Un sondage récent d'un groupuscule professionnelle démontrait que les psychologues lisent en moyenne cinq livres par an. Je vais donc pouvoir bientôt m'arrêter.
En attendant, les prochaines critiques à venir, ou en cours d'écriture pour différentes revues, livres choisis et souvent aimés, soulignent les tensions habituelles qui traversent mes lectures. C'est à la fois une diversion vis à vis des choses sérieuses que je devrais faire pour mon bilan comptable, en même temps qu'un éparpillement qui nourrit le centre.
A retrouver un jour dans Le Carnet Psy, Psychologie clinique et L'information Psychiatrique prochainement.
Approfondissement de l'analyse de groupe (Le vocabulaire clinique* de Philippe Robert, Christophe Bittolo, Raphael Riand et Cécile Corre (étrangement ignorée par Google)· 2025, outil parfait en ce début de saison universitaire; Le livre très fin, comme d'habitude, de J.B Chapelier et Claudine Jupner **, qui explore un point particulier de cette clinique du groupe: des voies alternatives à la parole interprétative: la scène, le silence, la posture, etc.). Très bien pour l'instant.
Etude de situation contemporaine de la profession, avec le livre de Gérard Fourcher* qui est actif en ce moment dans la revue psychologue et psychologie, et analyse finement le rapport IGAS, comme matrice d'une mutation profonde. Gérard Neyrand * qui a été assez présent sur la scène avec un entretien dans Le Carnet Psy de la rentrée (après celui de François Gonon avec qui il forme une sorte de diptyque) et un article dans Empan. Il montre comment les psychologues épousent une forme de développement personnel qui épouse une forme de néo-libéralisme renvoyant l'individu à sa responsabilité, indépendamment des surdéterminants sociaux. "Les propriétaires te raccrochent au nez quand ton nom et ton phrasé sonnent un peu trop arabe; tu as un prêt immobilier tendu au max, l'impression que ton employeur te prend pour de la merde; l'entretien de Gluksman par Demorand c'est au dessus de tes forces: ne te persécute pas, pioche dans tes ressources intérieures pour écouter Petit bambou et ça ira mieux."
Théorie et pratique de la Psychothérapie institutionnelle *** de J. Tosquelles est à la fois moins (livre inachevé, bordélique) et plus (il supplante par sa vivacité bien des commentaires contemporains) que ce qu'il annonce en grande pompe. Il fallait donc une analyse plus longue et approfondie.
L'adolescence, infinie, avec un livre qui a été choisi moins pour son titre que pour son sous-titre (le temps et le tendre). Quelque chose à fait résonance avec des travaux à venir sur les Mineurs Non Accompagnés, qui n'ont pas beaucoup de temps, dans des dispositifs pas toujours tendres. Et deux analyses de film, Kids ** et Goutte d'Or*** avec des collègues, qui se feront en 2026 vont dans le même sens: l'adolescence dégueulasse et pénible, pas celle qui souffre gentiment en couverture des magazines.
La nécessité de s'échapper dans des disciplines frontalières est aussi représentée. Jeanne Etelain ** sème sa zone, avec une analyse post deleuzienne qui vient remettre le territoire et la rigueur conceptuelle au centre. Elle cite Damasio, le cinéma (longue analyse de Tarkovski), distribue claques sur claques, gentiment, aux psychologues sans territoires, à distance, obsédés par la technologie. Même impression que pour Agathe Camus sur l'autonomie: ces disciplines ont à nous apprendre. C'est un peu le même mouvement qu'opère la revue Chimères ** qui a la fois élargit le champ, le détend, et l'approfondit (le corps des victimes de violence de guerre). Vraiment une belle découverte.
Grandir avec le vivant ***, écrit depuis la Guyane creuse des obsessions récentes pour le vivant non humain, avec plein de réflexions sur le compost et les chiens. Le fait de vieillir sans doute.
* Article déposé
** Ecriture en cours
*** Programmation
Ces livres et ses films ne sont pas parfaits, mais ils me semblent recommandables. Petite nouveauté, et pas seulement pour des raisons de sous-traitance industrielle, nous allons écrire certaines de ces critiques à plusieurs.